Vers & Prose
«
La poésie se forme à la surface d’un marécage. » (Jean Cocteau)
«
La poésie est partout comme Dieu n’est nulle part. » (Jacques Prévert)
§
Je me suis réveillé avec des étoiles sur le visage. (A.Camus / L’Etranger)
§ Et pierre parmi les pierres, il retourne dans la joie de son cœur
à la vérité des mondes immobiles. (A.Camus)
§
L’homme regardait le fleuve, en contrebas, signalé seulement par un large
mouvement d’obscurité, piqué d’écailles brillantes. (idem)
§ Il regardait sans les voir les étoiles exténuées qui
nageaient encore dans le ciel humide. (idem)
§
Ils nourrissaient alors leur mal de signes impondérables et de messages déconcertants
comme un vol d’hirondelles, une rosée au couchant, ou ces rayons bizarres que
le soleil abandonne parfois dans les rues désertes. (idem)
§ On y respire une mélancolie très particulière, la mélancolie
des bouts du monde. (idem)
§ J’ai horreur de ceux dont les paroles
vont plus loin que les actes. (idem)
§ On ne peut en même temps vivre parmi les hommes et avoir
raison. (idem)
§
Les jours finissent toujours par rejoindre les jours. (idem)
§ C’est un paysage écorché qui se fiche dans l’âme comme
un coin. (J.M.Varenne)
§ Le doute a donné à la tombe son prince d ‘ignorance.
(J.Kérouac/Dharma)
§
Mes propres pensées ne sont que des brouillards morbides. (idem)
§ Un amour fleurissait dans le terreau du désespoir. La fleur
s’appelait Pauline. (A.Ferney :La conversation amoureuse)
§
Il faut bien que tout le monde vive, alors tuez-vous un peu, il y a la queue
dans le ventre des mères. (xxx/Là-bas si j’y suis/Mermet/Inter/26 octobre00)
§ Désormais, je regarde ce temps désolant qui passe devant moi
comme un ennemi. ( Angélique Mukamanzi, rescapée tutsi)
§
De nos champs d’amour et de bataille…( C.Orban : j’étais l’origine
du monde )
§ C’était déjà tout un travail que de coudre ensemble les
morceaux du temps (S. de Beauvoir)
§
…d’une mer d’un vert si froid qu’il semblait solide : de la glace
en fusion. (idem)
§ Certaines fourmis doivent avoir des yeux tristes. (J.Kérouac/Dharma)
§
Nous soupirons pour nous soutirer la souffrance ulcérante. (idem)
§ Chaudes cuisses dorées produisent noirs matins froids. (idem)
§ Il n’y a pas de dernière pierre à jeter, pas de fond de
bouteille à l’illusion---pas de fin aux folles impressions imaginaires---pas
de fin au regret---pas de clarté dans le vin--- (idem)
§ Une bouteille de mort pour les abusés de la naissance (idem)
§ Ah, vas-tu sortir, vas-tu
sortir
sperme aveugle. (idem)
§ Les bites dures sentimentalisent
les cons institutionnalisés
Et voilà votre juteuse
Essence. (idem)
§ La vie est un Miracle ! crient-ils
en essuyant vigoureusement leur cul. (idem)
§ Un conte chinois.
Un petit garçon regarde un sculpteur devant son bloc de pierre
qui tape sur son burin à grands coups de masse…Ceci dure plusieurs jours. Un
soir, le bloc s’est transformé en un cheval.
Le gamin demande alors à l’artiste : « comment
savais-tu qu’il y avait un cheval à l’intérieur ? »
§
…mais que peut bien donner comme lumière une paillette atterrie sur l’œil
d’une morte ? (Claire Castillon/le Grenier)
§ Et tu caresses mes cheveux et j’ai envie de pleurer. (idem)
§
Joseph était un grand soleil, il est devenu un petit nuage qui pleut sur mes
yeux. (idem)
§ visage
et l’horreur de la mort
mais l’horreur
n’est qu’un masque
posé là
par la peur
visage
et toujours pas d’envers (B.Noël/Treize
cases du je)
§ dans la cave des yeux
attendre
attendre
de ne plus rien
savoir
de ne plus rien
vouloir
attendre
de ne plus attendre (idem)
§
La perfection de ce ciel gris pâle, orné aux quatre coins d’un motif de
nuage, très blanc, me fit presque pleurer. (F. Mallet-Joris)
§
…il respirait voluptueusement, comme un encens, l’odeur corrompue du monde.
(S de Beauvoir)
§
… celui qui avait laissé la plus belle empreinte sur les neiges du monde. (J.Steinbeck)
§ Ah ! Les fraises et les framboises
n’ont plus le goût d’antan et les cuisses des femmes ne nous excitent plus.
(Idem)
§
Et quelques hommes s’installaient confortablement dans le lit de la mort,
comme des poules couveuses. (Idem)
§ N’avons nous pas tous dragué et fouillé les eaux noires de
notre âmes ? (Idem)
§
Peut être avons nous tous un marais secret où le mal germe et prolifère.
(idem)
§ Chacun possède un coffret où il enferme ses douleurs secrètes
et dont il ne donne la clé à personne. (idem)
§ Les gens ne s’aiment pas les uns les autres.
Peut-être que, s’ils s ‘aimaient,
notre fin ne serait pas si triste ?
Entre temps je préfère regarder les jeunes
filles en fleurs
fleurs de chance.
(C.Bukowski)
§ Je sais qu’une certaine nuit
dans une certaine chambre
mes doigts
caresseront
bientôt
une douce
et claire
chevelure
il y aura des chansons comme aucune radio
n’en a joué
avec de la tristesse partout, et
tout çà se mélangera.
(idem)
§
Je ressentais chaque orgasme comme un affront à tous les symboles de décence
et de pudeur, le sperme blanc dégoulinant sur les crânes et les âmes de mes
parents défunts. (idem)
§ Même les cafards, les fourmis et les mouches voulaient la
baiser. (idem)
§
Un pigeon écrasé au milieu de la rue, une goutte de sang sur le bec.
(L.Calaferte)
§ ...l’imagination qui dresse son orgie
ne trouve
qu’un récif aux clartés du matin. (Ch. Baudelaire)
§
Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or. (idem)
§ Homme libre, tu chériras la mer. (idem)
§
Sois sage, ô ma douleur et tiens toi plus tranquille. (idem)
§ Elle était donc couchée et se laissait aimer ; (idem)
§ Moi seul j’étais triste, inconcevablement triste. Semblable
à un prêtre à qui on arracherait sa divinité, je ne pouvais, sans une
navrante amertume, me détacher de cette mer si monstrueusement séduisante, de
cette mer si infiniment variée dans son
effrayante simplicité, et qui me semble contenir en elle et représenter par
ses jeux, ses allures, ses colères et ses sourires, les humeurs, les agonies et
les extases de toutes les âmes qui ont vécu, qui vivent et qui vivront !
En disant adieu à cette incomparable beauté, je me sentais
abattu jusqu’à la mort ; et c’est pourquoi, quand chacun de mes
compagnons dit : « Enfin ! » je ne pus crier que :
« Déjà ! ». (idem)
§ Si on me dit que tu es partie
ou que tu ne reviendras pas
je ne vais pas le croire : je vais
t’attendre et t’attendre.
Si on te dit que je m’en suis allé
Ou que je ne reviendrai pas
Ne le crois pas :
Attends moi
Toujours. (R.F.Retanna)
§ Belle amie, ainsi est de nous :
Ni vous sans moi, ni moi sans vous. (Marie de France)
§ La mort a des rigueurs à nulle autre pareilles... (Malherbe)
§ Quand tu n’auras d’amis ni d’amours près de toi
penses à moi ! penses à moi ! (M. Desbordes-Valmore)
§ le corps se perd dans l’eau, le nom dans la mémoire.
(V.Hugo)
§
Nous étions seul à seule et marchions en rêvant...( P.Verlaine)
§ Laisse moi, parmi l’herbe claire
boire les gouttes de rosée
dont la fleur tendre est arrosée. (idem)
§ Et l’enfant répondit pâmée
sous la fourmillante caresse
de sa pantelante maîtresse
« je me meure, ô ma bien aimée » (idem)
§ Sûre de l’agenouillement
vers ce buisson ardent des femmes
follement, fanatiquement. (idem)
§ Et tumultueuse et folle, et sa bouche
plonge dans l’or blond, dans les ombres grises. (idem)
§ et c’est ton ombre que je cherche...(de Régnier)
§
Sans toi je ne vois rien qu’une étendue déserte. (P.Eluard)
§ Le couple doit oser
l’étreinte qui termine. (Pénélope)
§
Dans la soudaine ardeur d’un désir essentiel (M.Th.Quartier)
§ Cascadante ruée des effluves qui bougent
et se tordent en hurlant aux vagues de ton corps.
(P.L.Béguin)
§
J’ai osé pénétrer au fond de tes yeux gris... (G.E.Dollet)
§ et tes yeux m’ont caressée comme une marée montante.
(D.Maraval)
§
ton parfum exhalé irritait mes désirs. ( R.Morel)
§ J’ai cherché dans tes bras le pays
que j’ai cherché dans les déserts
un pays vaste et solitaire.
(M.Mermet)
§ en est-il des amours mortes
aux rideaux de chagrin. (B.Ravé)
§ Le pont vers le néant
s’éclaire...
(F.A.Rouard)
§
Dans l’ultime au delà tout sera persistant. (G.Sarazin)
§ Tu épuisais le sillon d’espérance ...
(C.Sébastia)
§ Puis, sur le drap froissé tu gémis doucement
car chacun des sursauts nous laisse pantelants
par un dernier éclair notre orage s’achève...
(G.Viala)
§ C’était un songe,
ou si vous préférez, un mensonge.
(O.S.Card)
§ Redevenir de ‘’geste’’
quand on était de marbre ?
(P.Léotard)
§ Jouis et fais jouir sans faire de mal
à toi et à personne,
voilà je crois toute la morale (Chamfort)
§
Ne te courbe pas pour aimer. (R.Char)
§ J’étais brûlé d’elle. J’étais sexuel. Animal. Elle
me guidait. (R.Bohringer)
§
Je voulais le silence aussi. Le bord intime des rivières. Le bord du ventre des
femmes. L’ombre divine. La peau, turbulence de l’âme. (idem)
§ Je veux remonter les rivières. Retrouver la forêt d’émeraude.
Je veux émerger. (idem)
§
Le monde qui file dans la mémoire. Avec ce désir au bout des doigts. Cette
soif de toi. Toujours. (idem)
§ Tout est beau dans ma mémoire. Je fais pousser des fleurs sur
de la merde. Vivre. (idem)
§
Tu sais, cette grande montagne entre ce que tu es et ce que tu veux
devenir…dis moi que cette montagne elle ressemble au sexe des femmes. (idem)
§ Abîme immobile. Une nuit comme un siècle. (idem)
§
Son bonheur humain. Son bonheur animal. Les gestes se suspendent, gonflés
d’amour sensuel dans l’air femelle. (idem)
§ Dans la nuit du plus grand désert du monde…la voûte céleste
t’emporte…T’es sur la Terre comme au Ciel. T’es comme c’était avant.
(idem)
§
Dormir est un naufrage, une île déserte. (J.Serguine)
§ Tous les matins du monde sont sans retour. (P.Quignard)
§
Notre vie entière, qu’était-elle dans le cours du monde ? A peine le
temps d’un soupir. (A.Philippe)
§ Le temps passe
Le temps
nous impasse
Le temps
nous trépasse
…
Tu es
mort
Tu hais
mort
…
On
déclare la guerre
On
ne déclare pas la paix. (
J.Prévert au sujet de R.Desnos)
§
On peut aussi se dissimuler dans la transparence. (P.Djian)
§ On ne domine pas le néant, on n’a pas d’action sur le
vide. (O.Mirbeau)
§
Le plasma du rêve est fait de la douleur des séparations. (H.Miller)
§ Dans la rue des Lions, j’ai cherché les pierres de la
vieille ménagerie où (Charles le Fou) nourrissait autrefois ses bêtes familières.
(idem)
§ Ce n’était que simulacres et faux semblants, songes et
mensonges. C’était la maya...
...Il ne désirait que le repos, la fin, il ne souhaitait plus
que d’arrêter la rotation éternelle de cette roue, cette revue interminable
d’images, et de les supprimer. Il désirait se mettre lui même en repos et
s’anéantir. (H.Hesse) ( je trouve que ce texte s’accorde
bien avec les Variations sur un thème de Haydn de J. Brahms !!!)
§
Le couchant est déjà dans l’aurore. (idem)
§
...des années effeuillées traînaient entre naguère et maintenant. (idem)
§ Sa chambre qui si misérable soit-elle, a tout de même
quelques vitres à mettre entre elle et la nuit. (F.Kafka)
§ On est couché tantôt contre ce mur, tantôt contre cet
autre, c’est ainsi que la fenêtre voyage autour de nous. (idem)
§ Dans le théâtre vert des hallucinations…(E.Ribas)
§ Les dernières lucioles des prairies du ciel s’éteignaient…(idem)
§ De chaque fleur fanée se dégageait une impression de
fatigue, de lassitude profonde. (N.Kafu)
§
…ta robe sur le tapis
et toi dans mon lit
Doux présent du présent
Fraîcheur de la nuit
Chaleur de ma vie. (J.Prévert / Paroles : Alicante)
§ ... un très minable vautour enchaîné dans une cage
d’ennui... (idem / C’était en l’an 22…)
§
la vérité des saisons sort de la bouche du printemps. (idem / Grand bal du
printemps : et l’automne et l’été…)
§ La mer de sa voix d’algues et de sel. (idem / xxx )
§
Ses grands oiseaux de mer ont des gestes d’adieu (idem / Charmes de Londres /
Charmes de Londres )
§
Le monde a soif d’amour : tu viendras l’apaiser. ( A.Rimbaud / Soleil
et Chair )
§
Fermentent les rousseurs amères de l’amour ! (idem / le bateau ivre )
§
Des lichens de soleil et des morves d’azur (idem / idem )
§
les fleurs de rêve tintent, éclatent, éclairent (idem / Illuminations /
Enfance )
§
la mélancolique lessive d’or du couchant. (idem / idem / idem)
§
cela se passa à une époque étrange qui répandait sur nous des fragments de
boue rouges, des mauvais sorts et des mensonges amers comme des racines de
quinquina. (C.Belaya / Les arbres… / 7ème veillée)
§
Leurs larges pieds pétaient la gueule au lyrisme des fleurs. (idem / idem / idem)
§
à l’instant où le soleil bascula comme pour annoncer sa fatigue. (idem /
idem / 8ème veillée)
§
Les esprits prennent forme humaine et se mêlent aux vivants. Vous pouvez les
voir se promener le long des ruelles, s’embrasser
sur les doigts des étoiles, rieurs et farceurs, beaux comme des hommes de la
première création. (idem / idem / 10ème veillée )
§
les haillons de soleil trompaient nos misères avec des symboles de riches.
(idem/idem/ 11ème veillée)
§
là où un brin d’air transportait la voix des esprits. (idem/idem/ 12ème
veillée)
§
Nous inspirions les senteurs des pluies venues du nord et cela aussi, l’odeur
vivante des âmes mortes. (idem/idem/idem)
§
Nous étions seul à seule et marchions en rêvant ( Verlaine / Saturniens /
Nevermore)
§
Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
d’une
femme inconnue, et que j’aime, et qui m’aime
et
qui n’est, chaque fois, ninitout à fait la même
ni
tout à fait une autre, et m’aime et me comprend. (Verlaine / Saturniens / Mon
rêve familier )
§
L’océan sonore
palpite
sous l’œil
de
la lune en deuil
et
palpite encore,
tandis
qu’un éclair
brutal
et sinistre
fend
le ciel de bistre
d’un
long zigzag clair
et
que chaque lame
en
bonds convulsifs
le
long des récifs
va,
vient, luit et clame
et
qu’au firmament
où
l’ouragan erre
rugit
le tonnerre
formidablement
( Verlaine / Saturniens / Eaux fortes / Marine )
§
Les sanglots longs
des
violons
de
l’automne
blessent
mon cœur
d’une
langueur
monotone.
Tout
suffocant
et
blême, quand
sonne
l’heure,
je
me souviens
des
jours anciens
et
je pleure ;
et
je m’en vais
au
vent mauvais
qui
m’emporte
de
çà, de là,
pareil
à la
feuille
morte. (Verlaine / Saturniens
/ Paysages tristes / Chanson d’automne )
§
...Le ver est dans le fruit, le réveil dans le rêve
et
le remords est dans l’amour : telle est la loi.
Le
bonheur a marché côte à côte avec moi. ( Verlaine / Saturniens / Nevermor )
§
Ma belle sera joyeuse !
l’aurore
se lève à travers sa beauté… ( Moyen Empire égyptien )
§
Quand tu reposes à l’occident, sous l’horizon,
la
terre est dans une ombre
semblable
à celle de la mort…
il
fait noir
la
terre est dans le silence ( Aménophis
IV / Akhénaton / ~XIV ème siècle )
§
Tu développes le germe dans les femmes
et
de la semence fais des hommes…
tu
donnes à ce que tu crées le souffle qui l’anime… ( idem )
§
Une glycine desséchée sur un vieil arbre, des corbeaux crépusculaires ;
un ruisseau, une passerelle, une chaumière.
La
bise sur l’antique sentier, un cheval étique ; le soleil du soir descend
à l’occident ; le voyageur anxieux chemine à travers la plaine. (Ma
Tche-yuan / Chine /XIIIème siècle)
§
Les temps ne sont plus que des fantômes épiques chevauchants des chevaux
spectres sous le ciel noir. (Verlaine/ Femmes )
§
Elle ne savait pas que l’enfer c’est l’absence. (Verlaine/Femmes)
§
Les saveurs de ta gloire secrète… (Verlaine/Femmes)
§
J’ai senti frémir sur mon front ce doux rapace cloué à la porte des Temps.
(M.Yourcenar / Feux / Marie Madeleine)
§
le fifre du désir, le tambour de la mort rythmaient leur valse triste qui
jamais ne manquait de danseurs. (M.Yourcenar / Feux / Phédon)
§
… me boucher les narines, pour ne pas humer la puanteur des âmes, si forte
que l’odeur des cadavres est près d’elle un parfum ;… (M.Yourcenar /
Feux / Phédon)
§
Le plaisir effectue en plein ciel un atterrissage forcé, dans le bruit de
moteur fou des derniers soubresauts du cœur.
(M.Yourcenar / Feux / Phédon)
§
Le monde n’est qu’un amas de taches confuses, jetées sur le vide par un
peintre insensé, sans cesse effacées par nos larmes. (M.Yourcenar / Nouvelles
Orientales / Wang-Fô)
§
Une inondation de nuit couvrait la moitié du monde. (M.Yourcenar / Denier du rêve)
§
Les morts dormaient, mais personne ne savait leurs rêves. (M.Yourcenar / Denier
du rêve)
§
Les ruines des monuments antiques font corps avec la nuit. (M.Yourcenar / Denier
du rêve)
§
C’était un homme à barbe grise, si simple et si grave qu’on pensait en le
voyant au vent salubre sur une mer sans soleil. (M.Yourcenar / l’Oeuvre au
noir)
§
c’est la terre en travail qui produit le diamant. (K.White / Terre de diamant)
§
Quand tu t’es dévêtue
la
pierre est devenue chair
et
quand tu as ouvert tes cuisses
c’est
l’Inde que j’ai pénétrée. ( K.White / Terre de diamant)
§
La lune folle aussi dansait seule sur la mer. (J.Prévert / La pluie et… /
Entendez-vous les…)
§
Tu me demandes quel jour la mort est née. (J.Prévert / La pluie et… /Sous le
soc)
§
Mais il y aura toujours un trou dans la muraille de l’hiver pour recevoir le
plus bel été. (J.Prévert / La pluie et… /Sous le soc)
§
Le temps ne sait pas l’heure
l’heure
ne dit pas le temps. (J.Prévert / La pluie et… /Sous le soc)
§
Chef-d’œuvre jamais écrit
opéra
de la fièvre
lucide
acide et doux… (J.Prévert / La pluie et… /Hôpital silence)
§
C’est dans la glace des autres
que
parfois on se reconnaît. (J.Prévert / La pluie et… /Portrait de Betty)
§
La mort est dans la vie la vie aidant la mort
La
vie est dans la mort la mort aidant la vie.
(J.Prévert / La pluie et… /Art abstrus)
§
Entre tes genoux,
après mon cœur que tu ronges,
que mangerons-nous ? ( Ch.
Cros / Berceuse )
§
... aux coulées inégales des gouttes d’eau sur la vitrine embuée...
(V.Woolf / Les vagues)
§
Il hantait des rues sordides dans des villes où des femmes nues, complètement
soûles, dormaient le matin de Noël sur le rebord d’une fenêtre. (V.Woolf /
Les vagues)
§
Les saveurs de ta gloire secrète… (Verlaine/Femmes)
§
Tant de gencives corpulentes pour malaxer mon cerveau mort. ( L.Calaferte /
Satori)
§
Le monde blennorrhagé s’achemine vers un écoulement silencieux. ( idem )
§
Elles lacent leur sensualité dans des frissons de robes. ( idem)
§
Les croupes, ô, les croupes circonférales de mes cavales amoureuses. ( idem )
§
Il faut passer par l’ennui des cercueils. Séjourner dans la division du
temps. ( idem )
§
Dans un midi ou un minuit bousculé d’étoiles, on a besoin de peu de choses
pour exister, pour contempler, pour savoir vivre. ( P.Renou / Camus de
l’absurde à l’amour )
§
Vivre debout, vivre sans remède pour ce plaisir sans consolation, avec cet
oxyde de douleur qui blanchit les cheveux. ( P.Renou / Camus de l’absurde à
l’amour )
§
Quand je regarde le soleil se lever, je ne m’attends pas à ce qu’il fasse
beau ou qu’il pleuve. J’essaye de le voir se lever. ( P.Renou / Camus de
l’absurde à l’amour )
§
Puis tu livrais tes trésors blancs
avec
des poses languissantes…
Le
frisson emperlait tes flancs
émus
des voluptés récentes. ( C.Cros /
Coffret de santal / Souvenirs d’avril )
§
Dans la cohue où tu te plais,
regarde-moi,
regarde-les,
et
tu comprendras mon silence. ( C.Cros / Coffret de santal / Excuse )
§
Voici le matin ridicule
qui
vient décolorer la nuit,
réveillant
par son crépuscule
le
chagrin, l’intrigue et le bruit. ( C.Cros / Coffret de santal / Insomnie
)
§
Les bals publics, flots d’obscènes souplesses
montrent
des chairs, bons repas pour les vers. ( C.Cros / coffret de santal / drame )
§
... Aux jasmins
les
chardons ont mêlé leurs haines. ( C.Cros / coffret de santal / heures sereines
)
§
C’est l’imprévue absurdité féminine, désastreuse et adorable, plus fière
des étoffes achetées que des blanches courbures de son sein… ( C.Cros /
coffret de santal / sur trois aquatintes / vanité sous marine )
§
... J’ai dédaigné les comptes à rendre et les justifications.
Mais
quand la fièvre pesante m’a égaré et fait redescendre, puis-je vivre seul
et sans soleil entre des murs de haine ?
( C.Cros / coffret de santal / lassitude )
§
Mon âme est comme un ciel sans bornes ;
elle
a des immensités mornes
et d‘innombrable soleils clairs.
( C.Cros / collier de griffes / inscription )
§ Des cheveux qui te font comme une tombe blonde
( C.Cros / collier de griffes / Phantasma )
§
Entends le bruit de l’eau... C’est comme des chansons,
c’est comme nos baisers, quand nous nous embrassons.
( C.Cros / collier de griffes / nocturne)
§
Il y a une heure bête
où il faut dormir.
Il
y a une heure fête
où il faut jouir. ( C.Cros / collier de griffes / berceuse)
§
J’ai tout touché : le feu, les femmes et les pommes… ( C.Cros /
collier de griffes / je sais faire des vers…)
§ La mer, les montagnes, les plaines,
tout est oublié. Je suis las,
las des bêtises et des haines. (
C.Cros / collier de griffes / Lilas)
§
Chaque jour palpite à la colle
de ta corolle
un papillon-coquelicot,
pur calicot. (
T.Corbière / les Amours jaunes / A une rose )
§
Trop longtemps épris d’un vain songe,
Gloire ! Amour ! vous eûtes mon cœur :
O Gloire ! tu n’es qu’un songe ;
Amour ! tu n’es point le bonheur.
( G. de Nerval / Odelettes / Pensée de Byron )
§
Je ne baigne dans la pourriture
de ma sécheresse
m’abreuvant au fiel de la terre.
J’enfonce mon corps en lambeaux
dans les sables verts d’un tombeau. ( Huguette Bertrand /
Espace perdu )
§
Dans les montagnes
le premier, le lointain battement
d’un tonnerre de printemps. ( Patrick Cullinan )
§ ... là, au lieu d’ampoules, un mimosa
allume sa fourrure d’abeille dorée... ( Ingrid de Kok )
§ .... des gens ont été abattus,
leurs corps laissés à s’égoutter dans la poussière. (
Robert Berold )
§ La finalité des mots est d’attraper des idées,
quand on a le sens, on peut oublier les mots.
J’aimerais rencontrer l’homme ...
qui
a oublié les mots. ( Robert Berold )
§ Quelque part dans le passé
nous croyions qu’à l’avenir ... ( Kelwyn Sole )
§ Je pense à toi, ta façon de tourner
le
ventre brun de ton amour vers moi
son odeur languissante montante de
la coupe sombre
et lisse de tes cuisses
tes seins,
lustrés comme deux aubergines
glissant sinueux sous
ma peau pâle. ( Tatamkhulu Afrika )
§ Ah ! cette mer ! elle rugit immensément
en venant de l’immense nuit... ( Tatamkhulu Afrika )
§ Il n’y a pas de chant plus beau
que
l’indifférence austère des collines. ( Seitlhamo Motsapi )
§
J’ai aimé, j’ai vécu,
j’ai
parcouru le monde ;
mais
je n’ai jamais atteint ce que je cherchais.
(
Elisabeth d’Autriche [Sissi] / Journal poétique )
§
A présent mon corps gît
tout
au fond de la mer,
les
récifs là-bas, aux vives couleurs,
le
déchirent et le blessent encore.
Dans
mes tresses se nichent
les
araignées de mer ;
une
armée visqueuses de polypes
occupe
déjà mes jambes.
Sur
mon cœur rampe
une
bête mi-vers, mi-anguille ;
un
homard cardinal
flaire
mes talons.
Des
méduses ont enlacé
mon
cou et mes bras ;
et
des poissons, vieux, jeunes
s’approchent
en essaim.
A
mes doigts je sens la succion
des
sangsues longues et grises,
dans
mes yeux vitreux
me
fixe un cabillaud.
Entre
mes dents
se
colle un coquillage.
Sans
doute recevras-tu un jour
la
perle de ma dernière larme.
(
Elisabeth d’Autriche [Sissi] / Journal poétique )
§
Je me souviens d'une échelle de bois qui montait vers l'isolement de ma pudeur.
Elle pénétrait dans les parfums des moissons.
Pour
entrer dans ma cache , il fallait écarter les bottes de paille et les refermer
derrière moi.
Je
partageais la lumière de l'unique lucarne avec les insectes et les araignées
qui gardaient dans leurs toiles les vibrations de mes mots à cœur ouvert.
Là
, je nichais mes humeurs de sauvageonne à califourchon sur le temps sans
aiguille.
Là
, je lisais les livres interdits pour apprivoiser mes rêves libertins.
Là
, j'oubliais les autres, les grands qui savaient.
(
Nathalie Lemazurier)
§ Mon sommeil était alors traversé de rêves lourds, pénibles,
pas précisément des cauchemars, mais comme de longs courants sous-marins qui
remuaient la vase des profondeurs tandis que la surface restait lisse, étale. (
Jonathan Littell / Les Bienveillantes )
§ ...mes yeux s’ouvraient et le monde s’y engouffrait,
rugissant, sanglant, vorace, m’éclaboussant l’intérieur de la tête
d’humeurs et d’excréments. ( Jonathan Littell / Les Bienveillantes )
§ Ma pensée emballée, affolée,...égorgeait mon sommeil. (
Jonathan Littell / Les Bienveillantes )
§ Le vent des montagnes n’engendre pas l’oubli. ( E Jelinek
/ Avidité )
§
L’instant où les choses réelles se décident à se dissoudre enfin dans
l’onde invisible du néant ( F.Cheng / le Dit de Tianyi )
§
chaque jour
on plante des morts
…
voir
est un clou
dans l’œil
…
entre les doigts
les doigts du vide
…
il y a du sable
dans la tête
et quelque part
passant
le grand mirage blanc
…
dans chaque tête
l’épure d’une tombe
…
l’inimaginable
est la seule vie réelle
(B.Noël/Treize cases du je)
§
Voici venir le temps où vibrant sur sa tige
Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir;
Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir;
Valse mélancolique et langoureux vertige!
Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir;
Le violon frémit comme un coeur qu'on afflige;
Valse mélancolique et langoureux vertige!
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir.
Le violon frémit comme un coeur qu'on afflige,
Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir!
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir;
Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige.
Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir,
Du passé lumineux recueille tout vestige!
Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige...
Ton souvenir en moi luit comme un ostensoir!
(Baudelaire
/ les Fleurs du Mal)
§
Mes yeux sont des éponges que je n'ose presser,
J'ai dans le corps un violon torturé,
Quant à mon âme?
Je l'ai depuis longtemps vendue
Contre un baiser, un ami ou un vers,
Je ne me souviens plus
(Clifford
Guillaume / Déclaration d'amer)
§
Convoquant la lumière en infiltrant le noir
Proposant le don en la douceur d'un velours bleu nuit
La langoureuse plainte muette d'un violon alité
(Sophie
Brugerolles)
§
Un violon d'hivers
Soufflant l'odeur boisée
De la mort et des vers
(Shower
sur forum NRJ)